Aujourd’hui, La Poste est l’une des plus grandes entreprises françaises, avec plus de 20 Md€ de chiffre d’affaires, et le deuxième employeur du pays après l’Etat, avec plus de 287 000 agents.<?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" />
La Poste de 2010 a beaucoup changé. L’ancienne administration des PTT est devenue une entreprise. L’outil industriel du courrier a été profondément modernisé avec des gains de productivité appréciables. La Poste est désormais un acteur majeur sur l’express en Europe, avec un réseau performant. Enfin, les services financiers des CCP sont devenus avec La Banque Postale une banque identifiée comme telle par le grand public. L’Etat a contribué à ce redressement en corrigeant pour l’essentiel les handicaps concurrentiels soulignés par la Cour en 2003.
Cependant La Poste est aujourd’hui confrontée à un double choc culturel : après deux siècles de monopole des activités postales, elle va affronter dans quelques mois l’ouverture complète du marché à la concurrence ; après un siècle de croissance forte et continue, elle aborde le bouleversement de l’internet et de la dématérialisation numérique. La Poste est certaine d’une forte diminution des envois papier dans les années qui viennent, mais elle est dans l’incapacité, comme chacun, d’en prévoir le point d’aboutissement à plus long terme.
Service public :
Les obligations de service public au titre de l’aménagement du territoire ne lui laissaient pas une complète marge de manœuvre.
Nombre de points de contacts :
- requis par le service universel (10 kms et pas de contrainte de temps) : 7 300
- requis pour satisfaire la loi du 2 juillet 1990 « Ces règles ne peuvent autoriser que plus de 10 % de la population d’un département se trouve éloignée de plus de cinq kilomètres, et de plus de 20 minutes de trajet automobile » : 14 000
- actuels : 17 000 soit 2 fois plus que le service universel et 10% de plus que la loi du 02/07/90 (dont 60% de bureaux de postes, 20% d’agences postales communales et 10% de relais poste commerçants)
Dialogue social :
Les accords de Vaugirard de 2004 (transformation de CDD en Cdi, la revalorisation des carrières, la réduction des temps partiels non choisis ou les procédures de mobilité…) ont permis à la Poste de concentrer le dialogue social sur les modalités des réorganisations plutôt que sur des objectifs préalables, tels les réductions d’emplois. Cet effort d’accompagnement social a naturellement pesé sur les charges de l’entreprise, mais il a permis beaucoup des changements qui sont intervenus, notamment une réduction de 14 % des effectifs de la maison mère entre 2003 et 2009, soit plus de 40 000 emplois. Le nombre total de jours de grève par agent est passé dans le même temps de 1,38 à 0,87 entre 2003 et 2008, soit une diminution de 37 %. Cette évolution traduit une diminution des conflits nationaux mais les arrêts de travail locaux liés à des projets de réorganisation sont plus fréquents.
Chute du trafic courrier :
Entre 2003 et 2007, le volume global du courrier a reculé de 0,8 %, mais le chiffre d’affaires correspondant a progressé de 8,8 %. La dissymétrie est encore plus forte pour le courrier des particuliers, en baisse de 8,5 % en volume mais en progression de 2,4 % quant au chiffre d’affaires. Le prix du timbre de la lettre prioritaire a augmenté de 17 %, induisant un impact positif sur le chiffre d’affaires (évalué par exemple à 342 M€ en 2005). La baisse totale de volume du courrier entre 2003 et 2009 représente – 4 500 tournées de facteurs.
La dématérialisation des envois a cru de manière exponentielle au cours des dernières années. Ainsi, le nombre de feuilles de soins électroniques est passé, avec l’introduction de la carte vitale, de 11 millions par an en 1999 à 1,1 milliard aujourd’hui, ce nombre continuant de progresser, tandis que le nombre de télé-déclarants à l’impôt sur le revenu est passé de 600 000 en 2003 à 9,7 millions en 2009.
Le marché du routage concernerait en France près de 7 milliards de plis, chiffre à rapprocher des 16 milliards d’objets traités par La Poste en 2009. L’ARCEP estime néanmoins que ce facteur n’est pas de nature à favoriser réellement la concurrence entre distributeurs car les marges de manœuvre commerciale des routeurs sont strictement limitées, et leur situation économique fragile.
A fin 2010 - chiffres Groupe la Poste : 36 plaques couvrant 80% du trafic auront été déployées, 76 % de l’investissement initial aura été réalisé et 90% de l’objectif de productivité atteint, 93 % des tournées de facteur feront l’objet d’une organisation en équipe.
Le retard pris dans le déploiement de CQC, pour dommageable qu’il ait été, en différant les progrès de productivité et de qualité de service, aurait pu avoir un effet positif si La Poste l’avait mis à profit pour anticiper le fort repli du courrier et réduit plus fortement qu’elle ne l’a fait, à la marge, la configuration du projet. Elle aurait pu limiter le surdimensionnement des 45 plates formes industrielles du courrier (PIC).
Bilan des gains de productivité à fin 2008
Selon les calculs de la Cour, les effectifs pro forma de la maison mère du courrier sont passés de
178 243 personnes en 2003 à 161 297 personnes en 2008, soit une diminution de 9,5 % en 5 ans, inférieure à celle de l’ensemble de La Poste maison-mère. Les gains en emplois s’établissaient donc à mi-parcours, en fin 2008, à seulement 38 % (soit 16 246 EAA) des possibilités ouvertes par le programme d’industrialisation. La Poste demeure en retard par rapport à ses principaux concurrents. Tel est le cas dans le secteur de la distribution où l’on constate que, depuis 2003, le nombre d’objets distribués par agent est la résultante quasi mécanique de la diminution du nombre d’agents et de la réduction du nombre d’objets à distribuer. En d’autres termes les gains de productivité ne sont qu’apparents. En 2009, la baisse du trafic, à -5,3 %, n’est encore que partiellement compensée par des gains de productivité, le nombre d’objets distribués par agent diminuant de près de 2 % (au niveau de 161 000 environ). La poursuite de cette tendance poserait un problème redoutable au courrier.
Surnombres :
En 2008, on dénombre 2 179 surnombres, soit plus de 1 000 agents année après déduction des missions de renfort temporaire qui ont pu leur être confiées. Par ailleurs, les dépenses d’intérim du Courrier, sont passées de 29 M€ en 2004 à 105,5 M€ en 2008, démontrant ainsi un besoin d’adaptation d’autant plus fort que l’ensemble des composantes variables de la force globale de travail ne représentait en fin 2009 que 5 % du total des moyens humains. En principe, les principaux enjeux de productivité se trouvent dans la distribution = plus de 50 % des coûts globaux de traitement du courrier.
Facteurs d’avenir :
Dans ce domaine, le programme « Facteurs d’avenir » (FA), décrit plus haut, a pour objectif d’adapter les moyens aux fluctuations conjoncturelles d’activité. Fin 2008, ce programme s’appliquait en principe à la moitié des 62 000 tournées existant en France. En 2009, 87 % des tournées auraient basculé dans ce type d’organisation, permettant un gain de productivité de 3,4 % sur les deux dernières années. Selon La Poste, le projet Facteurs d’Avenir aurait atteint les objectifs qui lui étaient assignés pour faciliter l’étalement des fluctuations saisonnières ou quotidiennes du trafic et améliorer la qualité de service. Il n’est néanmoins pas suffisant pour permettre à La Poste de tirer le plein bénéfice des gains de temps structurels dégagés par l’automatisation du tri. Un nouveau processus de réorganisation des tournées semble donc s’imposer.
En 2009 5517 M€ La situation de Deutsche Post DHL et de TNT est sensiblement plus favorable. En février 2009, la Deutsche Post a vendu 22,9 % des actions de Postbank à la Deutsche Bank (montant de la transaction : 4,9 Md€). Suite à cette cession, la dette nette de Deutsche Post DHL s’est considérablement réduite (et sa liquidité nette a augmenté) de -2 466 M€ en 2008 à +1 690 M€ en 2009. Pour TNT le ratio dette nette/EBE s’élève en 2009 à 0.96, contre 2.96 pour La Poste.
QS
Le contrat de plan 2003-2007 avait cependant fixé un objectif de 85% qui n’a jamais été atteint sur aucune des années concernées et rarement sur un mois donné. Pour la période 2008-2010, le contrat de service public a pris acte des difficultés de La Poste et réduit les ambitions de qualité en fixant l’objectif à 83 % en 2008 et 84 % en 2009, soit pratiquement au niveau déjà atteint en 2007. Pour la première fois en 2008 et 2009, l’objectif réglementaire a été légèrement dépassé (83,9 % en 2008 et 84,7 % en 2009). Ce résultat est décevant au regard des performances supérieures à 90% réalisées dès 2006 dans les sept pays suivants: Pays-Bas (96,6%) ; Finlande (96%) ; Allemagne (95,9%) ; Suède (94,2%) ; Danemark (94,1%) ; Royaume-Uni (94%) ; Belgique (92%). L’Espagne et l’Italie se situaient à cette époque en dessous de 90%, mais avaient cependant des résultats plus favorables que ceux de La Poste.
Enseigne et temps d’attente :
Cette démarche commence à porter ses fruits. Le temps d’attente a été significativement réduit en 2009. Pour les opérations simples, qui représentent près de la moitié des opérations, le temps d’attente des clients dans les 1 000 plus grands bureaux est passé de 6 minutes et 50 secondes en fin 2008 à 4 minutes et 30 secondes fin 2009.
Coût excessif des filière du métier courrier :
Les charges de personnel représentent 77% du chiffre d’affaire de la Poste en 2009.
Ainsi la Cour a relevé le coût excessif de la filière financière du courrier. Cette situation résulte de la volonté de conférer à chacun des responsables des 41 structures territoriales la maîtrise de ses propres fonctions support. Il en résulte un éclatement excessif des structures et une hypertrophie des moyens. Par comparaison avec les fonctions financières d’autres entreprises, la Cour avait estimé le surcoût à 27 M€, correspondant à 700 postes environ. Dans sa réponse La Poste a indiqué que cette filière serait réorganisée d’ici 2015 et n’a pas contesté cette estimation.
Pour l’ensemble des métiers, la fonction RH mobilise 2,95 % des effectifs de la maison mère, les autres entreprises publiques se situent à un niveau sensiblement moins élevé (exemple : 1,55 % à la RATP, ou 1,15 % à la SNCF). Ce constat est dans une certaine mesure celui du reflet encore tenace de l’organisation ancienne de l’administration d’Etat des PTT- découpage départemental. Ayant consacré une priorité stratégique au projet CQC, La Poste a été conduite parfois, pour rendre acceptable certaines restructurations industrielles, à maintenir des organisations administratives très dispersées, aujourd’hui moins justifiées.
Dans son plan Ambition 2015, La Poste place en première position des cinq priorités stratégiques « la parfaite exécution de ses quatre missions de service public ». Cette ambition ne peut qu’être approuvée. Concernant le service postal, la Cour estime que la distribution du courrier 6 jours sur 7 ne saurait être remise en cause, même si nombre de grands opérateurs postaux l’envisagent pour leur part, et recommande que l’engagement de La Poste vis-à-vis de ses clients pour la distribution en J+1 soit significativement relevé et rendu plus effectif. Constatant que dans un périmètre moins étendu que la France entière, les lettres prioritaires sont déjà effectivement distribuées dans le délai de J+1 dans 95 % des cas, l’objectif de qualité pourrait être relevé de 85 % à 95 % dans des parties de territoire à définir. Le même engagement s’appliquerait dans chaque zone pour respecter une égalité de traitement de tous les usagers. Pour les destinations plus éloignées, en particulier celles qui imposent aujourd’hui un transport aérien, l’engagement serait également de 95% mais dans un délai maximal de 48 heures. La plage utile pour la remise du courrier à La Poste devrait alors être élargie, de manière à autoriser un dépôt plus tardif de la correspondance dans un nombre plus important de boîtes aux lettres En permettant une optimisation du réseau du courrier, en améliorant le taux d’utilisation de l’outil industriel, en réduisant les coûts du transport, en même temps que les émissions de CO², cette évolution représenterait une économie des coûts du Courrier qui peut être estimée dans une fourchette de 500 à 600 M€ par an. L’enjeu financier mérite d’autant plus d’attention que la part de la lettre prioritaire dans l’ensemble du courrier baisse (32 % des volumes en 2008) et que nombre de clients, notamment les entreprises, privilégient la certitude d’une remise du courrier sous 48 heures, au risque de non réception dans le délai de J+1 de 1 courrier sur 6 (85 %).
L’adaptabilité de la distribution :
Le programme Facteur d’Avenir ne permet pas dans son format actuel d’obtenir un véritable resserrement de l’organisation de la distribution. En effet, quand 70% du tri arrivée aura été mécanisé, voire 80% comme envisagé antérieurement, le temps de travail des facteurs consacré à des travaux préalables à leur tournée de distribution se réduira de manière importante. Dans un mécanisme qui repose sur le pur volontariat, il n’est pas avéré que la répercussion de ces économies de temps conduise nécessairement à une réduction du nombre des tournées.
Bien adapté aux objectifs spécifiques qui lui étaient assignés, le programme FA doit désormais être complété par un nouveau projet visant à adapter l’organisation de la distribution aux évolutions structurelles du plan de charge des facteurs. Comme souligné plus haut, dans le secteur du courrier, un nouveau programme prenant le relais de « Facteur d’Avenir » permettrait d’adapter la distribution à la charge de travail nouvelle.
La banque et enseigne :
Dans le secteur bancaire, le développement des automates et de la banque à distance ont eu pour effet entre 2005 et 2008 de réduire de plus de 16 % les activités financières du guichet, alors que les coûts facturés à ce titre à La Banque Postale ont augmenté de plus de 10 %. Une telle distorsion entre l’évolution de l’activité et celle des charges appelle un ajustement des moyens correspondants.
Les marges d’ajustement :
Des marges d’action importantes existent également dans le domaine des organisations fonctionnelles et des fonctions support, comme souligné plus haut. Ces réorganisations supposent un éventail plus adapté des modes d’organisation du travail tenant compte des besoins réels des métiers. La Poste, sans remettre en cause son engagement fort contre la précarité de l’emploi, devra trouver les méthodes qui lui permettent de concilier la qualité des emplois contractuels avec un large choix d’organisation du travail (exemple : recrutements en alternance ou emploi à temps partagé d’étudiants et de seniors).
A l’évidence, des progrès restent à faire en la matière au regard par exemple du niveau élevé de l’absentéisme. Proche de 7 %, le taux d’absentéisme de La Poste semble supérieur à celui que connaissent la plupart des secteurs d’activité (4,4% dans l’industrie, 3,9% dans les transports). Des programmes de réduction de l’absentéisme ont été lancés dans les métiers, comme Présenceo au Courrier, sans résultats bien tangibles pour le moment. Une action particulière pilotée par le siège du groupe s’impose. L’ensemble n’est pas sans risque. La Poste a d’ailleurs identifié l’ajustement des emplois aux activités comme un « risque majeur » dans la cartographie de ses risques. C’est dire toute l’importance que revêt une politique active de mobilité.
Organiser la mobilité
Les réorganisations déjà réalisées ont entrainé des changements d’affectation importants mais ils ne se produisent qu’au sein d’un même métier et s’effectuent dans un périmètre géographique étroit (les changements de département ne représentent que 10 % des mutations).
En application des accords sociaux signés, la direction ne peut imposer la mutation d’un agent en surnombre que dans un rayon de 30 km. Par ailleurs La Poste ne tire pas le meilleur parti des moyens importants qu’elle a mis en place pour accompagner sa politique de mobilité. Ainsi, alors qu’il existe dans les métiers près de 300 conseillers en mobilité, leurs actions pourraient être mieux coordonnées et surtout plus étroitement pilotées par le siège en fonction des priorités du groupe.
La Poste doit reconsidérer sa politique de mobilité interne. Dans la situation qui est la sienne, elle ne peut plus s’accommoder de l’existence de « surnombres » de durée croissante, correspondant à des sureffectifs officiels, des personnes sous-utilisées ou des postes à contenu plus ou moins virtuel. Elle devra négocier un mécanisme qui permette plus de souplesse. Les dispositions décidées récemment dans le cadre de la fonction publique de l’Etat pour accroître la mobilité peuvent constituer une piste de réflexion. La mobilité vers l’extérieur est également à développer.
L’entrée de la Caisse au capital ne peut pas se réduire à une simple participation financière. Cette évolution capitalistique n’a de sens que si elle conduit, avec l’implication de l’Etat, à développer des synergies entre ce nouvel actionnaire, La Poste et certaines de leurs filiales.
Le groupe CNP Assurances
La Poste, via La Banque Postale, et la CDC entretiennent des relations étroites à travers leur actionnariat commun au sein du groupe CNP Assurances. Le capital de CNP Assurances se répartit, aujourd’hui, entre deux blocs d’actionnaires principaux : la CDC (qui détient près de 40 %), premier actionnaire, et Sopassure (à hauteur de 35,48 %), contrôlée par les deux réseaux distributeurs de produits CNP Assurances, à savoir La Banque Postale (à hauteur de 50,1 %) et le groupe BPCE (49,9 %). Ces actionnaires sont liés, depuis 1998, par un pacte d’actionnaires, dont l’Etat est également signataire, qui vient à échéance au 31 décembre 2015 (voir annexe n°13). Un équilibre a donc été trouvé de longue date, malgré les intérêts éventuellement divergents qui peuvent exister entre les distributeurs, La Banque Postale et le groupe BPCE, qui cherchent à concentrer l’activité de CNP Assurances sur leur marché, et la CDC, exclusivement actionnaire, qui soutient la stratégie de développement à l’international de CNP Assurances. L’entrée de la Caisse au capital de La Poste crée une situation inédite. Elle conduit mécaniquement à accroître la participation de la Caisse et donc, potentiellement, son influence sur CNP Assurances.
Dans le même temps, le fait pour la Caisse de devenir actionnaire de La Poste serait plutôt de nature à faire converger ses intérêts d’actionnaire à la fois dans CNP Assurances et dans La Poste. CNP Assurances est, en effet, une filiale très importante pour la CDC. La participation de La Banque Postale dans le capital de CNP Assurances offre une rentabilité élevée, utile à son résultat. Par ailleurs, en tant que réseau distributeur des produits d’assurance vie et de capitalisation de CNP Assurances, La Banque Postale perçoit des commissions de collecte qui représentent une part significative de son produit net bancaire (entre 9 et 10 % selon les années). Dans un contexte où La Poste fonde le rétablissement de sa rentabilité sur un développement soutenu de La Banque Postale, il est manifestement de son intérêt que ne soit pas rompu l’actuel équilibre actionnarial de CNP Assurances.
La fréquence de levée et de distribution
La troisième directive postale européenne permettrait de limiter à cinq jours par semaine la levée et la distribution du courrier mais, sous réserve des jours fériés, le courrier est levé et distribué en France six jours sur sept. Quatre autres pays (Allemagne, Danemark, Pays-Bas et Royaume-Uni) imposent 6 collectes et distributions par semaine. Certains opérateurs n’ayant d’obligation que cinq jours par semaine ont cependant choisi une fréquence de 6 jours sur 7, soit sur l’ensemble de leur territoire (Estonie, Italie, Malte), soit seulement dans les zones urbaines (Espagne, Lettonie, Lituanie, Slovénie). Au total 15 pays de l’Union Européenne se limitent à une collecte et une distribution cinq jours par semaine.
La Banque Postale a obtenu du législateur la reconnaissance de sa spécificité dans le domaine de l’épargne réglementée compte tenu du rôle significatif joué par le livret A. Sur 21,7 millions de livrets A ouverts à La Banque Postale, 60% de livrets, soit 12 millions, ont un solde inférieur à 150 € ; ces livrets, qui ne totalisent que 0,7% des encours, ont cependant un coût de gestion très important : ils pèsent en effet pour environ 50 % dans les coûts de gestion du livret A car ils comptent parmi les livrets les plus utilisés (ils sont à l’origine de 44% du total des opérations sur livrets. La loi de modernisation de l’économie a donc maintenu, au seul bénéfice de La Banque Postale, une mission d’accessibilité bancaire à travers le livret A.
Jusqu’en 2008, La Poste a pensé que les activités courrier demeureraient le principal contributeur à ses résultats. Sa stratégie lui a permis franchir des étapes significatives de sa modernisation.
Ses procédures de pilotage et de gestion ont été portées au standard des grands groupes privés de services. Les performances de son outil industriel du courrier sont désormais comparables à celles de ses grands concurrents européens. Même si son réseau est encore incomplet, en particulier à l’international. Dans les limites de son agrément, La Banque Postale peut rivaliser avec les autres banques de réseau, tout en conservant sa spécificité de banque ouverte à tous. Les foyers de pertes structurelles de certains métiers ont été redressés. Le groupe a su multiplier par quatre son résultat d’exploitation et son bénéfice net entre 2003 et 2007. Sa rentabilité opérationnelle est devenue bien supérieure à celle des années 2000.
La Poste est aujourd’hui dans une situation plus difficile. Le plan « Ambition 2015 » répond à ces préoccupations. La Cour en partage les axes essentiels. Même si la perspective d’une amélioration de la rentabilité du groupe La Poste (dont la marge opérationnelle s’établissait à 3,69 % en 2009) paraît fondée, la réalisation complète de l’objectif fixé dans le plan « Ambition 2015 » (soit un doublement du résultat d’exploitation d’ici 2015) paraît plus ambitieuse.
En premier lieu, La Poste doit affirmer sa capacité à réaliser des efforts de productivité. Elle doit aussi concrétiser les gains de productivité du programme « Cap Qualité Courrier ». Enfin, pour préserver les acquis de son modèle social, La Poste doit trouver des formules plus souples pour concilier le rythme des départs naturels, le maintien d’un minimum de recrutements et la réduction des effectifs.
Par ailleurs, La Poste doit renforcer sa capacité de développement et d’innovation. La Poste doit également offrir de nouveaux services, plus transversaux, tirant avantage des compétences de tous les métiers du groupe. La Poste doit impérativement renforcer sa qualité de service. Elle doit notamment poursuivre ses efforts pour améliorer l’accueil dans les bureaux de poste, en recherchant également les améliorations adaptées aux spécificités des petits bureaux, et pour améliorer les modalités de livraison des colis aux particuliers.
Le changement de statut résultant de la loi du 9 février 2010 et l’augmentation de capital de 2,7 Md€ annoncée ont pour ambition d’aider le groupe à préparer cet avenir. L’entrée de la CDC au capital de La Poste n’a de sens que si elle ne se résume pas à une simple participation financière. La CDC doit s’impliquer dans la stratégie de La Poste. Sa participation aux instances de gouvernance devra être fixée en conséquence. Dans le même esprit, l’occasion doit être saisie de développer des synergies entre l’opérateur postal, la Caisse et certaines de leurs filiales. L’Etat joue un rôle majeur vis-à-vis tant de la CDC que de La Poste. Il devra donc veiller à que ces orientations se concrétisent dans un pacte d’actionnaires qu’il devrait conclure avec la CDC.
Enfin, les principes de la compensation du coût net des missions d’aménagement du territoire, de transport de la presse, d’accessibilité bancaire et du service universel postal sont aujourd’hui définis. Il demeure cependant, en particulier pour cette dernière mission, des incertitudes. En vertu de la loi du 9 février 2010, le gouvernement doit présenter en 2013 au Parlement un rapport sur l'exécution des missions de service public. Cette occasion devrait être mise à profit pour apprécier l'adaptation de ces missions aux évolutions des attentes du public, des usagers et des clients, en tenant compte de leur coût, de leur consistance et de la situation financière de La Poste.
1. Conclure un pacte d’actionnaire entre l’État et la CDC dans le but de donner sa pleine signification à cette nouvelle répartition du capital et de développer les synergies potentielles entre La Poste, la Caisse et certaines de leurs filiales.
2. Dès lors qu’elle disposera des capacités financières, humaines et techniques adéquates, étendre l’agrément de la Banque Postale à l'octroi de crédit aux personnes morales, en orientant prioritairement ses efforts vers les petites et moyennes entreprises (PME), y compris les très petites entreprises (TPE), ainsi que vers les associations.
3. Relever significativement l’objectif de qualité de la distribution en J+1 et le rendre plus effectif dans un périmètre géographique pertinent. Dans le même temps, élargir la plage utile pour la remise du courrier en permettant un dépôt plus tardif dans un nombre plus élevé de boîtes aux lettres.
4. Examiner en 2013 la compensation des coûts supportés par La Poste au titre des missions de service public au regard de l’évolution des besoins du public et des entreprises, du périmètre de ces missions et de la rentabilité du groupe.
5. Examiner, dans ce même esprit, la question de l’assujettissement de La Poste à la taxe sur les salaires qui la place dans une situation d'inéquité concurrentielle.
6. Réaliser des simulations complémentaires tournant autour d’une hypothèse alternative de baisse des volumes économiques du courrier de 40 % entre 2008 et 2015.
7. Renforcer la qualité de service en priorité pour résoudre la question de l’accueil et de l’attente dans les bureaux de poste, sans délaisser les petits bureaux, et améliorer les modalités de livraison des colis aux particuliers.
8. Réduire les charges fixes, notamment en rationnalisant l’organisation des fonctions support au sein de chaque métier ainsi que la gestion du parc immobilier du groupe, qui représente son deuxième poste de charges.
9. Tout en maintenant le nombre des points de contact, poursuivre leur transformation en partenariats et engager un effort de réduction du poids de leurs structures de gestion.
10. Clarifier les lignes de responsabilité entre La Banque Postale et l’Enseigne.
11. Permettre le plein effet des perspectives de départs naturels en instaurant une complète fluidité entre les secteurs en décroissance et les activités en développement.
12. A cet effet conférer une importance prépondérante à la formation qualifiante des agents en place pour leur permettre d'évoluer vers les nouveaux emplois qui pourront leur être proposés et renforcer l'efficacité des dispositifs existants de mobilité interne et externe. Disposer d'organisations plus performantes et plus adaptables en fonction des besoins de l'entreprise, notamment pour la distribution du courrier.
14. Pour ColiPoste, élargir les choix de livraison proposés aux clients, renforcer sa présence dans le commerce électronique, développer le colis standard de particulier à particulier en Europe. Pour l’express, poursuivre son implantation internationale, sans viser le créneau des grands intégrateurs mondiaux.
16. Pour les métiers connexes du courrier, tirer profit des complémentarités existantes entre les diverses sociétés du pôle documentaire, privilégier la recherche de valeur ajoutée et l’innovation, tout en demeurant prudent quant aux opérations de croissance externe en Europe.
17. Affirmer la capacité du groupe à faire des offres commerciales globales impliquant tous ses métiers.
Comparaison entre opérateurs postaux européens
Résultats des opérateurs postaux européens
GROUPE LA POSTE | 2003 | 2007 | 2008 | 2009 |
CA en M€ | 18 004 | 20 778 | 20 799 | 20 527 |
REX en M€ | 310 | 1 306 | 886 | 757 |
Marge opérationnelle en M€ | 1.72% | 6.29% | 4.26% | 3.69% |
Résultat net en Me | 202 | 943 | 529 | 531 |
Résultat net/CA | 1.12% | 4.54% | 2.54% | 2.59% |
Effectif |
|
| 295 742 |
|
DEUTSCHE POST | 2003 | 2007 | 2008 | 2009 |
CA en M€ | 40 017 | 54 043 | 54 474 | 46 201 |
REX en M€ | 2 975 | 2 133 | - 966 | 231 |
Marge opérationnelle en M€ | 7.43% | 3.95% | -1.77% | 0.50% |
Résultat net en Me | 1 309 | 1 383 | - 1 688 | 644 |
Résultat net/CA | 3.27% | 2.56% | -3.10% | 1.39% |
Effectif |
|
| 451 515 |
|
TNT | 2003 | 2007 | 2008 | 2009 |
CA en M€ | 11 866 | 11 017 | 11 152 | 10 402 |
REX en M€ | 767 | 1 192 | 982 | 648 |
Marge opérationnelle en M€ | 6.46 % | 10.82% | 8.81% | 6.23% |
Résultat net en Me | 300 | 986 | 556 | 281 |
Résultat net/CA | 2.53% | 8.95% | 4.99% | 2.70% |
Effectif |
|
| 114 493 |
|
La Poste a entrepris à partir de 2003 une modernisation de l’organisation de son activité courrier et des efforts de gains de productivité. Ces mesures ont été plus tardives que chez Deutsche Post DHL et TNT. A la suite de la réunification allemande, la Deutsche Post a dû absorber la Poste EST allemande. Elle a donc procédé à des restructurations massives dès le début des années 1990 pour améliorer ses résultats. Cette restructuration a dégagé toutes les conséquences permises en termes de productivité par des investissements majeurs d’automatisation des processus de traitement du courrier. Grâce aux résultats dégagés suite à ces restructurations et à l’augmentation du prix du timbre, la Deutsche Post s’est lancée dans une série d’acquisitions (achat de 132 compagnies en 10 ans) qui lui ont permis de constituer un réseau européen de l’express107.
De son côté, le groupe TNT a largement recours au temps partiel afin de réduire ses coûts salariaux. Sur un effectif de 54 375 agents aux Pays Bas en 2007, 69% travaillent à temps partiel, ce qui est permis par le niveau élevé de mécanisation du tri du courrier, aujourd’hui supérieur à 95%.
Les résultats d’exploitation de TNT et Deutsche Post DHL ont fortement décliné à compter de l’exercice 2008. S’agissant de Deutsche Post DHL, outre l’impact de la réduction des volumes du courrier et de la crise économique, se sont ajoutées les difficultés conjoncturelles consécutives à son aventure américaine qui sont largement à l’origine des résultats et de la marge opérationnelle négatifs enregistrés sur l’exercice 2008. Les résultats de Deutsche Post DHL se sont d’ailleurs redressés au cours de l’exercice 2009.
Un rapprochement consécutif des performances de La Poste avec ces deux opérateurs européens, tant au niveau de la marge opérationnelle que de la marge nette. Ce rapprochement doit néanmoins être nuancé au regard du fait que les gains de productivité de La Poste demeurent inférieurs à ceux de ses concurrents dans le domaine du courrier et que l’endettement du groupe est très supérieur à celui de ses concurrents. Il doit également l’être au regard du fait que le recul des performances de Deutsche Post DHL est largement imputable à son échec sur le marché domestique de l’express aux Etats Unis.
La mise en œuvre de programmes de réduction des charges opérationnelles, notamment à partir de l’exercice 2009, pour faire face aux conséquences de la crise économique et de la réduction des volumes du courrier. Ce programme a été d’une ampleur très importante pour Deutsche Post DHL (permettant d’économiser 1,1 Md€ sur l’exercice 2009). Les réductions de coûts se sont élevées en 2009 à 527 M€ s’agissant de TNT et à 395 M€ s’agissant de La Poste108.
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La Poste : l'essentiel du rapport de la cours de comptes